Les tendances de ce secteur évoluent vers une production et une consommation plus responsables. Cependant, il est encore trop tôt pour avoir une vision complète de l’ampleur des impacts environnementaux de la beauté et des soins personnels. L’entreprise spécialiste en conseil de développement durable Quantis active à l’international a analysé les données existantes du secteur des cosmétiques afin de poser les premières hypothèses d’impact environnemental. Dans son rapport « It’s time to make up the future » publié en 2020, Quantis estime la contribution mondiale du secteur des cosmétiques aux émissions de gaz à effet de serre (GES) entre 0.5 à 1.5%.
ETAPES DE VIE DES COSMETIQUES ET LEURS EFFETS SUR L’ENVIRONNEMENT
Brin de Soi vous propose alors une synthèse des résultats présentés dans ce rapport (version complète ici) avec l’approche d’analyse de cycle de vie (ACV). Cette méthode permet d’identifier toutes les étapes de vie d’un cosmétique, leurs enjeux et leurs potentiels impacts environnementaux. L’ensemble de ces informations permettent de comprendre quelles phases nous pouvons influencer en tant que consommateur et d’identifier les possibilités d’action. L’article Faire les bons choix pour sa santé et l’environnement propose, par ailleurs, une série d’actions (non exhaustive) par étape de cycle de vie d’un cosmétique.
Pour l’heure, étudions de plus près l’histoire et le parcours de vie des produits cosmétiques. Comme l’illustration ci-dessous l’exprime, un cosmétique passe par 7 étapes de vie. Les impacts environnementaux sont exprimés en %.
1. Ingrédients et formulation
Cette première étape consiste au choix et à l’extraction de matières premières (ingrédients) ainsi qu’à leur transformation (formulation) pour créer un cosmétique. Ce dernier peut alors être conventionnel (ingrédients synthétiques, issus de la pétrochimie) ou naturel (issus de l'agriculture, la nature) ou encore bio (issus de l'agriculture biologique). La part des ingrédients et leur formulation est estimée à 10% des impacts globaux du cycle de vie d’un produit cosmétique.
Comme le démontrent l'illustration ci-dessous, il est intéressant d'observer que l’impact environnemental diffère d’un produit conventionnel d’un produit naturel . Par exemple, une glycérine naturelle à base d’huile de soja brésilienne émet davantage de CO2 qu'une glycérine synthétique (épichlorhydrine). A contrario, la glycérine synthétique consomme 5 fois plus de combustibles fossiles.

De plus, à l’instar de l’agroalimentaire, un ingrédient naturel exerce une forte pression sur des ressources telles que les sols (changement d’affectation, pollution) et l’eau (pollution). D’autres critères environnementaux sont à considérer comme la déforestation et la biodiversité.
En tant que consommateur, nous pouvons agir sur cette première étape en s'intéressant à la composition d'un produit cosmétique (liste INCI à l'arrière du produit). En effet, s'y intéresser est d'ores et déjà un geste en faveur de sa propre santé et celle de l'environnement. Afin de faire les bons choix, les articles listés ci-dessous vous aide à y voir plus clair:
A la découverte du monde des cosmétiques
2. Emballages
L’emballage primaire (contenant en contact direct avec le produit ) et l’emballage secondaire (emballage facilitant le stockage et le transport) jouent un rôle crucial dans la vie d’un produit cosmétique. Ils servent autant à la bonne conservation et l’utilisation du produit ainsi qu’à des fins de promotion pour les marques.
Les emballages possèderaient une part importante de l’empreinte écologique d’un cosmétique (20%). Pour élaborer des emballages durables, les entreprises utilisent de plus en plus une approche d’éco-conception. Pour vous aider à identifier un emballage durable, posez-vous les questions suivantes :
- L'emballage peut-il être réutilisé, rechargé ou recyclé afin de prolonger sa durée de vie ?
- Son design est-il simple ? Facilite-t-il la séparation des matières utilisées au moment du tri ?
- Les matières utilisées sont-elles nobles ? Permettent-elles d'être recyclées afin d'éviter une mise en déchargeable et une incinération au moment du tri ? La quantité de matière utilisée est-elle réduite à son strict minimum ?
- le contenant (flacon, par exemple) est-il optimisé de façon à assurer un usage complet et économe du contenu ?
Les illustrations ci-dessous démontrent qu'il est toujours intéressant de se renseigner si un cosmétique peut être rechargé au non. En effet, plus on recharge un flacon, plus notre impact environnemental diminue. De manière générale, les magasins en vrac et drogueries du Nord-vaudois vendent des contenants rechargeables et des cosmétiques en vrac.


3. Fabrication
Cette étape du cycle de vie correspond au processus de la fabrication du produit cosmétique et de son emballage au sein des entreprises/usines. Afin de diminuer leur empreinte environnementale estimée à moins de 5% de l’impact global, les entreprises peuvent agir sur plusieurs niveaux :
- Réduire les besoins en énergie en améliorant l’efficacité énergétique de toutes les installations
- Augmenter l’utilisation des énergies renouvelables locales
- Insérer une stratégie de durabilité sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement
Ici, en tant que consommateur, nous pouvons consulter le site internet des marques. Certaines d'entre elles renseignent sur ce sujet.
4. Distribution et transport
Une fois que le produit cosmétique est prêt à faire son entrée sur le marché, respectivement à quitter l’entreprise, il est alors distribué aux clients par l’intermédiaire ou non d’un revendeur. Selon Quantis, la logistique et la distribution représenteraient une part relativement faible de l’empreinte global d’un cosmétique. Or, le commerce électronique et la vente en ligne augmentent fortement. A ce jour, il n'est pas encore possible de déterminer si le commerce électronique a plus ou moins d’impacts que le commerce traditionnel. De plus, les résultats pourraient varier en fonction du produit, du contexte géographique ainsi que de la chaîne d’approvisionnement.
A noter que l’impact des transports des cosmétiques entre l’entreprise de production et le consommateur final est quand même estimée à 10% de l’impact global. Là aussi, nous pouvons agir afin de limiter autant que possible la distance qui nous sépare d'un produit en favorisant l'économie locale, régionale ou nationale. Il existe de plus en plus de marques suisses offrant des cosmétiques avec l'appellation "SwissMade".
5. Commercialisation et marketing
Arrivé au point de vente, l’efficacité énergétique des commerces redevient un enjeu dans la vie d’un cosmétique. De plus, le matériel promotionnel (marketing) est omniprésent. La part de la gestion des points de vente et les actions de promotion spécifiques (événement, communication) représenteraient 10% de l’impact global d’un cosmétique. De plus, le matériel de communication engendre beaucoup de déchets.
Tout comme pour la formulation des produits et le développement des emballages, le matériel utilisé pour le marketing devraient suivre l’approche d’éco-conception afin d’optimiser la performance environnementale. Outre l’éco-conception, les marques sont invitées à évaluer l’efficacité des supports de communication/marketing afin de déterminer quel support garder ou abandonner afin d’améliorer leur campagne et diminuer l’impact environnemental.
Ici aussi, il s'agit de prendre le temps d'observer les pratiques d'une marque notamment ses supports de communication.
6. Utilisation
Une fois vendu, un produit cosmétique tombe entre les mains d’un consommateur, soit vous et moi. Cette phase correspond à la façon dont nous l’utilisons, en tenant compte des ressources nécessaires pour sa consommation telles que l’électricité et l’eau. Rarement prise en compte par les entreprises, la façon dont un produit cosmétique est utilisé pourrait représenter l’impact le plus important dans le cycle de vie de produits de soins personnels (40%). Toutefois, la famille des cosmétiques étant vaste, tout dépend du produit en lui-même. Par exemple, un shampoing ou un gel douche nécessite un rinçage occasionnant la consommation d’eau et d’électricité pour la chauffer. Le maquillage a aussi besoin d’être enlevé à l’aide d’un coton (ou autre). Un produit ne nécessitant aucun rinçage n’aura alors pas le même impact.
L’impact environnemental de la phase d’utilisation est aussi influencé par la situation géographique du consommateur. Quantis nous propose de comparer deux pays différents : la Colombie et les Emirates arabes unis. L’illustration ci-dessous nous indique que pour une même quantité de shampoing (250ml) les émissions de gaz à effet de serre (GES) ainsi que la consommation d’eau diffèrent d’un pays à l’autre. Ici, l'énergie non renouvelable utilisée dans les Émirats arabes unis pour chauffer l'eau (rinçage) génère trois fois plus d'émissions de GES que le mix énergétique renouvelable de la Colombie. La consommation d'eau, (pour la douche et le processus de refroidissement des centrales électriques), pondérée à la rareté de l'eau, serait cinq fois plus importante dans les Émirats arabes unis qu’en Colombie.

7. Fin de vie
Cette ultime étape est estimée à environ 5% de l’impact global. La vie du produit et son impact environnemental ne s'arrêtent pas une fois qu'il a été utilisé. Mais comment est-ce possible ? D’une part, cela s’explique par le fait que tous les cosmétiques possèdent un potentiel écotoxique agissant après l’utilisation par le consommateur. Voyons quelques exemples de cosmétique possédant un potentiel écotoxique :
- Les produits à rincer (shampoing, gel douche, savon) s’écoulent dans le système d’approvisionnement et traitement des eaux. Dans les régions dépourvues d’un système avancé, les ingrédients présents dans la formule ne sont pas traités. Des produits chimiques (microbilles, par exemple) peuvent alors se retrouver dans l'environnement et nuire à la qualité de l'eau, à la biodiversité et aux terres agricoles. Favoriser des ingrédients biodégradables est une étape importante, bien que certains d’entre eux puissent aussi avoir un effet toxique avant de se dégrader.
- Les produits en aérosol (mousse à raser, déodorant, parfum, laque) libèrent du gaz dans l'air contribuant à la formation de smog et à la pollution de l'air à l'intérieur des habitats.
- Les produits solaires possèdent de l'oxybenzone qui serait un ingrédient chimique capable de pénétrer les écosystèmes marins et endommager les récifs coralliens.
D'autre part, les emballages deviennent des déchets. Ces derniers possèdent, par ailleurs, un taux de recyclage généralement très faible. En effet. 120 milliards d’emballages sont produits chaque année dans l’industrie des cosmétiques dont seulement 50% peuvent être recyclés. L’enjeu pour les entreprises est alors d’augmenter la recyclabilité des emballages et/ou favoriser leur circularités (recharge de l’emballage, réutilisation) et encourager les consommateurs à adopter les bons gestes. Les mesures à prendre sont à prévoir dès la conception de l’emballage et du produit (écoconception).
Sylvie
Source
Quantis (https://quantis.com/)